Pas facile de mettre nos enfants expatriés au français, cette langue que l’on pratique souvent à l’oral en famille mais que l’on perd doucement à l’écrit. Le bain linguistique dans le pays d’expatriation est un obstacle de taille.
Et nos enfants ne sont pas toujours très coopératifs quand il s’agit d’apprendre cette langue qu’ils n’utilisent que très peu. Comment faire pour que – quelque soit la méthode que vous avez choisie – les cours de français se passent le mieux possible ? Voici trois points essentiels qui – je l’espère – vous permettront de leur faire aimer le français.
1. Prendre en compte l’avis de notre enfant
Contraindre notre enfant à apprendre le français sans tenir compte de son avis est le plus grand des pièges. En effet, nous parents, nous pensons être souvent « ceux-qui-savent » et nous sommes persuadés du bien fondé de se mettre au français.
Les raisons sont diverses : nous nous projetons déjà dans le retour, nous connaissons les bienfaits du bilinguisme, nous sommes sûrs que la maîtrise du français sera un avantage important pour réussir plus tard.
De ce fait nous nous sentons dans notre bon droit lorsque nous l’inscrivons dans une démarche d’apprentissage sans lui demander son avis.
Mais nous oublions de nous mettre à leur place. Nous n’aimerions pas que quelqu’un décide pour nous, n’est-ce pas ?
Osons impliquer l’enfant dans cette décision. Et l’impliquer réellement et sincèrement. Et s’il refuse, me demanderez-vous ?
Essayons de comprendre ses propres raisons et trions ensemble les bonnes et les mauvaises excuses. C’est peut-être qu’il n’est pas encore prêt. Il n’y voit pas encore les avantages, les plaisirs, les conséquences.
Acceptons ce « non » et ajoutons « Pas pour le moment ». Inutile pour autant de baisser complètement les bras : pourquoi ne pas créer autour de lui un environnement pour l’amener à changer d’avis ? Vous lisez vous-même des livres en français ? Parlez-en avec lui ! Vous avez aimé tel film français ? Regardez-le ensemble. Une langue, bien avant d’être une suite de règles, est avant tout une expérience à vivre !
En lui laissant la décision de cet apprentissage, votre enfant se sent écouter, il est confronté à la responsabilité qui lui incombe, et vous lui montrez que vous avez confiance en lui. Tout cela compte aussi !
« Nul n’aime se voir contraint à faire un certain travail, même si ce travail n’est pas déplaisant. C’est la contrainte qui est paralysante. » (Célestin Freinet)
2. Accepter qu’il puisse y avoir des conflits
Des conflits, il y en aura ! « Maman, j’ai pas envie de faire du français maintenant ! » « Arrête de me dire que j’ai faux, c’est bon, je la connais cette règle ! » « Papa, c’est trop dur, j’y arriverai jamais ! »…
Ces remarques ne sont pourtant pas ce que nous croyons : ce sont avant tout des signaux d’alarmes ! Avant de les prendre pour des attaques personnelles ou pour de fausses excuses, écoutons vraiment ce que notre enfant a à nous dire.
Peut-être ressent-il des difficultés ? Peut-être a-t-il besoin d’une pause entre deux activités ? Peut-être a-t-il besoin de plus d’autonomie ? Ou inversement de plus de conseils ?
Nous avons souvent peur de rentrer en conflit avec notre enfant. Nous souhaitons tous vivre sereinement dans un environnement calme et respectueux.
Mais voilà, parfois nous n’avons pas les mêmes avis, pas les mêmes ressentis, pas les mêmes idées. Pour le français, comme pour tout autre chose.
Le conflit n’est agréable pour personne mais il est un élément essentiel du développement de l’enfant. Imaginez un enfant qui vous obéisse tout le temps au doigt et à l’œil. Un enfant qui n’a jamais un mot plus haut que l’autre.
Trouveriez-vous ça normal ? Ne vous poseriez-vous pas de question ? Savoir dire « non, ça ne me convient pas » est une manière de s’affirmer pour l’enfant. Et l’accepter comme tel permet d’ouvrir un dialogue enrichissant pour la relation parents-enfants.
Pour commencer, il faut comprendre d’où vient le conflit : « Est-ce moi ? Je suis peut-être fatiguée ce soir… » « Est-ce mon enfant ? Il a avoué avoir eu une dure journée. » Est-ce un élément extérieur ? Une mauvaise nouvelle ?…
En mettant le doigt sur la réelle source du conflit, vous allez pouvoir trouver une solution adéquate. Les conflits sont courants dans toutes les familles, même si on en parle peu.
Pour résoudre ces conflits en douceur, laissons passer la colère et avec beaucoup d’écoute, d’attention et de bienveillance, ouvrons le dialogue pour trouver la solution où chacun s’y retrouve.
« Une difficulté ou un sentiment désagréable sont plus vite dépassés quand ils sont entendus et reconnus que quand ils sont niés ou rejetés. » (Anaëlle Sanzey)
3. Mettre le plaisir en priorité
Admettons-le : qui pourrait avoir du plaisir à la lecture du Bescherelle ? Qui ne s’est pas plutôt arraché les cheveux avec les règles de grammaire et leurs exceptions ? Le français est une langue qui s’apprivoise et c’est avec le temps qu’on la maîtrise. Le plaisir d’apprendre est autant dans le fond que dans la forme. C’est un état d’esprit quotidien à travailler.
Faire des jeux autour du français, rire des expressions imagées qui sont toujours cocasses lorsqu’on les prend au premier degré, commencer une correspondance avec un ami français, jouer une pièce de théâtre, lire un livre qui fait peur à la lumière d’une lampe de poche sous une cabane en couverture, et – pourquoi pas? – écrire son propre livre ?
La créativité permet de sortir de la routine et de faire en sorte que votre enfant retrouve ce plaisir de la langue ! Vous n’aurez plus à vous battre si vous mettez en place un environnement agréable et ludique.
Et votre enfant apprendra d’autant plus efficacement car cet apprentissage sera lié à des moments heureux.
« La joie d’apprendre est aussi indispensable aux études que la respiration aux coureurs. » (Maria Montessori)
Un dernier conseil, pour finir, pour vous parents expatriés : ne vous oubliez pas ! En effet, il est courant d’avoir ce sentiment de sacrifice car nous passons beaucoup de temps et d’énergie pour que nos enfants puissent apprendre le français.
Nous nous forçons parfois à nous mettre avec eux autour d’un cours mais le cœur n’y est pas. Osons trouver dans les méthodes proposées quelque chose qui nous conviennent à nous aussi !
Osons adapter ces méthodes pour qu’elles répondent autant aux besoins et aux envies de l’enfant qu’aux nôtres. Osons prendre l’apprentissage du français pour ce qu’il est : une belle aventure en famille !
Catherine Alibert, octobre 2016
Pour aller plus loin:
Catherine Allibert, accompagnatrice des enfants expatriés dans le monde de la langue française.
Son site web : http://www.unehistoiredeninjasetdesamourais.com/
Sa page facebook : https://www.facebook.com/unehistoiredeninjasetdesamourais
Elle propose aussi aux parents des réunions gratuites de 30 minutes par Skype pour faire le point sur les méthodes d’apprentissage du français les plus adaptées à leur situation.