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Rester parent quand on se sépare

kelly sikkema E8H76nY1v6Q unsplashVoici quelques pistes pour vous aider à en parler avec vos enfants.

 

La douleur personnelle, que partager ?

Il est primordial de partager avec votre enfant en des termes qu’il comprend sur votre vécu affectif.

Nous ressentons tous de façon inconsciente ce qu’il se passe chez l’autre : en analysant les expressions du visage, les tons de la voix, les émotions que nous avons à leur contact. Vous-même adulte, si vous entrez dans une pièce à la toute fin d’une dispute entre deux collègues, vous serez à même de ressentir la tension entre ces deux personnes.

Si vous entendez que « tout va bien » vous serez alors mal à l’aise car votre intuition vous donne une information de tension, et votre raisonnement, voulant faire confiance à l’information, vous indique que tout va bien. Si vos collègues ont l’honnêteté de vous dire qu’ils ont un diffèrent, mais que cela les regarde eux, vous vous sentez tout d’un coup plus serein : vous avez une information cohérente avec votre intuition émotionnelle.

Vous avez bien compris le parallèle fait avec une situation de séparation parentale : que vous le vouliez ou non, vos enfants savent, sur un plan inconscient, émotionnel, intuitif, que votre relation est douloureuse ou tendue. Mettre des mots sur cette situation la rend plus facile pour votre enfant, cela le rassure tout simplement sur son intuition. Vous avez le devoir de le mettre dans une situation de cohérence émotionnelle.

 

Comment le dire ?

La façon d’évoquer les conflits ou les problèmes d’adulte avec un enfant n’est pas toujours évident. On a peur d’en dire trop, de faire peur, de devoir accueillir leurs réactions.

Vous trouverez la bonne façon de le dire en vous posant la question de savoir ce qui « appartient » à votre personne et ce qui « appartient » à la famille. Votre couple est le fondement de la famille, de celui-ci découle le couple parental, et de ce partenariat découle la parentalité telle que vécue par votre enfant.

Votre identité personnelle et votre relation amoureuse ne sont pas un sujet dont vos enfants font partis. Mais la dynamique familiale et ce que vivent vos enfants oui.
Vous trouverez les mots lorsque vous aurez fait le clair entre ce que vous vivez vous, en tant qu’homme/femme, mari/femme, et ce que vivent vos enfants avec leurs papa et maman, les personnes avec qui ils vivent. Vous trouverez les mots qui parlent de façon vague de difficultés d’adultes et vous pourrez replacer le sujet sur son bien être à lui.
« Papa et maman sont tendus, ils ont beaucoup de questions d’adultes, ce sont des histoires personnelles, nous t’aimons tous les deux et toi tu as tes histoires d’enfant »
« Papa et maman sont en train de prendre des décisions de couple, ce qui est important c’est que tu puisses être toi car nous t’aimons comme tu es »
Vous voyez dans cet exemple le minima employé pour parler de ce qui touche la sphère adulte mais qui le rassure sur son vécu intuitif, en le replaçant dans son rôle d’enfant dont il n’a pas à bouger.

 

Le sujet le plus important : l’amour inconditionnel

Replacer l’enfant dans son rôle d’enfant vous ouvre la porte sur le deuxième sujet le plus anxiogène pour l’enfant : votre amour. Les enfants vivant ce contexte de divorce sont souvent sujets à ce que nous appelons « l’angoisse de séparation »(1).
En toute logique, si mes parents peuvent arrêter de s’aimer, ils arrêteront peut-être un jour aussi de m’aimer moi.
En toute logique, si le couple de mes parents explose, c’est potentiellement ma relation avec papa ou maman qui peut aussi exploser un jour.

Les paroles d’amour, portées sur la relation uniquement, sont importantes pour les enfants et primordial chez l’enfant de parents qui se séparent : Nous parlons ici d’évoquer à votre enfant un amour qui n’a pas de condition, qui ne comporte aucune autre condition que le lien qui vous unit.

Je vous recommande vivement le livre « mon amour »(2) qui permet de dire tout cela à votre enfant par le biais d’un livre. Vous pouvez prendre l’habitude de dire de façon régulière, au coucher par exemple « je t’aime, parce que tu es toi, parce que tu es mon fils / ma fille, tu es une personne essentielle au monde, je t’aime parce que c’est comme ça, je t’aime tous les jours et pour toujours ». Il reprend en un beau livre le concept des paroles d’amour de la thérapeute Bernadette Lemoine sur l’angoisse de séparation .
Ces paroles un peu « bisounours » peuvent paraitre inutiles, étranges, à côté de la plaque… mais vous trouverez comment les faire vôtre afin de transmettre à votre enfant cette sécurité interne primordial à son bien-être.

Vos enfants ont un grand besoin de se sentir serein dans la relation qu’ils ont avec vous et avec leur autre parent. Rassurer un être cher sur la pérennité de la relation et de l’amour qui vous unit est toujours utile et sain.

 rester parents

Préserver l’image de l’autre parent

La tâche la plus dure est souvent de préserver l’image de votre ex conjoint.

Vos enfants sont vos enfants mais ils sont aussi les enfants de votre conjoint, que vous le vouliez ou non, que votre amour ait duré ou non.

Plaçons-nous au niveau de l’enfant : lui a deux parents, qu’il n’a pas choisi et qui sont les modèles de sa vie, les principaux acteurs dans son développement. Un enfant grandit en répondant aux attentes, aux injonctions, aux interdictions, aux valeurs de ses deux parents. L’image de la femme et de la mère ainsi que de l’homme et du père se créent chez les enfants en réponse à sa relation avec sa mère et son père : c’est ainsi.

Vous êtes peut-être dans la colère, dans l’injustice, dans la tristesse, dans la trahison, dans la violence, dans le rejet… ou tout autre forme du deuil de votre relation. Mais votre ex conjoint reste une figure primordiale dans le développement de votre enfant, avec ses limites, ses défauts et ses excès, mais c’est ainsi.

Vous devez dissocier votre ex conjoint et ce qu’il représente pour vous dans votre vie de ce qu’il est en tant que parent dans la vie de votre enfant.
IL en va du bien-être et de la santé mentale de vos enfants.

Vous pouvez rester authentique dans vos discours en dissociant justement comme vous l’avez fait pour parler de la séparation. « ton papa/ta maman a fait certain choix dans notre relation d’adulte mais je sais qu’il/elle t’aime et que tu l’aimes et votre relation est précieuse, tu as le droit d’aimer les adultes importants de ta vie même si moi je ne l’aime plus ».

Vous pouvez penser que dire de telles choses sont inutiles et que votre enfant « sait » mais nous en revenons à cette incohérence profonde qu’un enfant peut ressentir que nous appelons « conflit de loyauté »(4). L’enfant pense bien s
ouvent devoir prendre partit, devoir défendre un parent, devoir choisir un camp.

Vous pouvez penser que dire de telles choses est impossible ou ridicule mais vous devez penser en terme de papa/maman et non pas en terme de mari/femme. Votre enfant vit une relation avec son parent qui n’est pas la relation que vous vivez avec cette même personne.

En offrant ce message à votre enfant, vous le débarrassez d’un énorme poids, d’une grande incertitude, et d’une grande souffrance.
Votre enfant a besoin de continuer à voir chacun de ses deux parents pour ce qu’ils sont pour lui, un père, une mère, qui les aime chacun à leur façon.

 

Aude Mouton
psychologue.mouton@gmail.com
www.audemouton.com

Juin 2020


1-MarK Banschick, MD, The Intelligent Divorce book
2-Mon amour, de Astrid Desbordes (Auteur), Pauline Martin (Illustrations) 2015
3-Maman ne me quitte pas de Bernadette Lemoine
4-Ivan Boszormenyi-Nagy, psychiatre, pionnier en matière de thérapies familiales depuis les années 1950, traitera du sujet des loyautés « invisibles », dans son ouvrage intitulé « Invisible Loyalties, Reciprocity in Intergenerational Family Therapy

Photo Unsplash – Kelly Sikkema

 

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