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La bienveillance a ses limites

irina murza yH2WMrdLMYs unsplash 1Comment l’enfant peut-il apprendre et comprendre les limites sans punitions ?

Pourquoi ce tapage à propos de la bienveillance ?

Pourquoi punir et donner la fessée qui était considérée jusqu’alors comme un « bon » choix et qui est aujourd’hui si décriée ?

 

Tout est une question d’âge

Avant 6 ans, le cortex préfrontal n’est pas suffisamment développé pour faire son travail : réguler les émotions de façon efficace.

Nous avons tous vécu ce grand moment de solitude face à notre enfant en complète tempête émotionnelle devant… son biscuit cassé.

Dans ce cas, nous voyons et analysons cette situation et le comportement de l’enfant avec notre prisme et cerveau d’adulte. Nous ne sommes pas capables de comprendre la frustration et la déception de l’enfant face à ce gâteau « simplement » cassé.

L’émotion peut bien entendu apparaitre chez l’adulte mais elle est vite « contrôlée » par le cerveau et produit un comportement « a minima » car l’émotion est intériorisée.

Nous avons tous tenté d’expliquer avec calme que « non, il n’y a plus de raisins » devant un enfant qui nous répond sans relâche que « oui mais moi j’en veux un maintenant ! »

Le cortex préfrontal qui permet d’accueillir une émotion et de la soumettre au concept de la réalité (=prendre du recul) n’est pas encore fonctionnel ni mature. L’enfant n’est donc pas en mesure de comprendre que son désir doit être soumis à une réalité concrète.

Il n’y a donc rien d’anormal à ce que l’enfant avant 5 ou 6 ans ne soit pas à même de contrôler un grand nombre de ses vécus émotionnels et que cela se perçoive à travers des comportements qui ne sont pas « acceptables » socialement.

 

Alors comment expliquer que les punitions « marchent » ?

Tout d’abord, marchent-elles vraiment ? Il faut bien souvent un grand nombre de répétitions de punitions pour que le comportement disparaisse. Une punition inclus toujours une notion de peur. On propose un déplaisir, une peur, à l’enfant en face d’un comportement. C’est alors une autre partie du cerveau qui se met en route.

Le « système de récompense », qui associe récompenses et punitions, provoque des productions hormonales qui vont amener le sujet à répéter ou éviter un comportement. C’est la base du training animal.

Donc à l’usage, il est vrai que le comportement peut s’accentuer ou s’arrêter, mais cet entrainement n’est pas un apprentissage sur le long terme.

En effet, l’enfant a du mal à faire le lien entre la punition et « l’intérêt » de la punition. N’en est-il pas de même pour les adultes…combien d’entre nous râlent lorsqu’ils reçoivent un PV ? Un excès de vitesse est une mise en danger de l’autre et de soi… mais le PV reste une punition peu acceptable et désagréable… qui finalement n’a que peu d’incidence sur nos comportements sur la route… Sur ce point, les études montrent d’ailleurs une amélioration du comportement du conducteur après un stage qui explique les dangers au volant plutôt qu’après une amende…

Les comportements qu’un parent veut arrêter ou provoquer chez son enfant comportent une notion d’acceptation social. Si l’on réfléchit vraiment à la règle que l’on veut mettre en place, on devrait y trouver une logique, une rationalisation sociale, un intérêt dans le développement de l’enfant. Dans ce cas, il est toujours possible de trouver une solution intelligente pour répondre à la situation.

 

Et comment faire pour les comportements dangereux ?

Il faut différencier obéissance et soumission. Dans une relation de confiance, l’enfant sera plus enclin à faire confiance à la personne qui le sécurise.

L’enfant qui a un comportement dangereux (qui mord, traverse la route, ne s’attache pas en voiture…) n’est souvent pas en recherche de provocation. Cette compétence arrive plus tard (après 6/7 ans). Il est peut-être dans la recherche des limites, dans la compréhension entre le bien et le mal, entre ce qui est acceptable et ne l’est pas, etc… mais il est bien souvent dans une recherche de la relation à l’autre.

Ouvrir le dialogue, expliquer, rendre possible l’expression du sentiment est toujours une bonne idée.
Un enfant est très rapidement dans le conflit quand il est en désarroi face ses propres émotions. Il va chercher à « prendre le contrôle » pour se sentir puissant et fort. Il va aussi éprouver un sentiment de frustration quand, vivant dans un monde de plaisirs, des contraintes liées à la réalité vont survenir.

Ces situations sont autant de signes essentiels qui lui permettent de verbaliser et de l’amener à développer ses propres compétences.

 

Un enfant a besoin de limites.

Oui. Absolument vrai.
La parentalité bienveillante ne signifie pas l’absence de limites, la parentalité bienveillante est la tentative de poser des limites de façon respectueuse en respectant l’enfant, son développement et son intégrité.

Les violences ordinaires sont nombreuses :
– demander à un enfant un contrôle émotionnel que son cerveau n’est pas capable de produire
– demander à un enfant une absence d’émotion et de variation émotionnelle
– ne pas proposer de dialogue ou montrer d’empathie
– céder aux atteintes physiques comme la fessé, la tape sur la main…
– les atteintes verbales comme les insultes, le dénigrement, les menaces

Mais aussi :
– laisser tout faire à l’enfant, lui donner le choix sur tout
– ne pas avoir d’exigence et le laisser seul assumer ses comportements
– le laisser dominer l’autre, qu’il soit un autre enfant ou un autre adulte

Ces derniers exemples sont aussi sont des violences ordinaires car l’enfant rentre dans une toute puissance très anxiogène dont il est très dur de sortir.

Pour se sentir en sécurité l’enfant a besoin de sentir que son parent est stable, sûr de lui, qu’il est un guide fiable.
Les adultes ont une supériorité intellectuelle, développementale, physique, d’expérience, ils doivent absolument imposer un cadre de vie à l’enfant dans lequel celui-ci peut se développer en sécurité.
Ce cadre est l’ensemble des règles de la société, de la famille que l’enfant doit apprendre à suivre pour être un membre actif de la communauté dans laquelle il vit.

On peut choisir de l’aider à se développer par contrainte ou par coopération.

 

Mais alors comment faire ? Comment trouver un juste milieu ?

Vos objectifs à long terme

La première étape me semble être de réfléchir au long terme.
Comment voulez-vous que vos enfants soient dans 20 ans ?

En se projetant dans le futur, on trouve les réponses à nos demandes éducatives. Se tenir correctement à table est une demande classique, qui change d’un pays à l’autre mais qui reste une aptitude importante à apprendre. Si l’on imagine nos enfants dans le futur, on peut alors leur expliquer que manger correctement est une marque de respect de l’autre, c’est une compétence qui nous permet d’appartenir à un groupe, de respecter l’espace autour de nous, ceux qui nettoient…

Éduquer par l’exemple.

Si vous voulez des enfants empathiques, soyez empathique envers eux. Si vous voulez des enfants attentifs, soyez attentifs à eux. Si vous voulez des enfants authentiques, soyez authentique…

Nos enfants se crient dessus, disent des gros mots et tapent parce qu’ils imitent ce qu’ils voient. Un enfant imite jusqu’à tard dans son développement, et vous êtes sa principale source d’inspiration !

Comment un enfant peut-il comprendre qu’il est mal de taper… en se faisant taper ? C’est une ambivalence que le cerveau ne peut pas accepter. Et si les mots le disent, l’expérience physique reste la même : je suis dominé par la douleur physique, je dominerais par la douleur physique.

La punition

La punition est la première chose à enlever car vous voulez sortir du conflit pour entrer dans le partenariat.

Proposez à votre enfant de participer à la conversation éducative. Même très jeune vos enfants vous surprendront par leur capacité à analyser ce qu’ils vivent.

Choisissez un sujet qui vous importe et en accord avec vos valeurs familiales et tentez de faire comprendre à vos enfants son importance. Ayez une discussion à propos de pourquoi vous agissez de telle ou telle manière, les conséquences si vous suivez ou non ce principe et comment vous pouvez le gérer en famille (qui est une petite communauté).

Tentez le partenariat sur un sujet et voyez les effets rapides !

 

Pour mieux comprendre, je recommande les livre de Catherine Gueguen et Isabelle Filliozat, pour des outils techniques les livres de Faber&MAzlich, et pour en parler des ateliers ou groupes de paroles peuvent être très efficaces.

 

Aude Mouton
Psychologue Clinicienne
Skype: psychologue.mouton
www.audemouton.com

Octobre 2020

 

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Photo : Irina Murza – Unplash

 

 

 

 

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