Nos jeunes face à l’enseignement à distance et l’isolement

Nous n’avons pas tous les mêmes chances.

Cette phrase simple prend je trouve tout son sens aujourd’hui.
Même si la crise que nous traversons est mondiale, elle ne touche pas tout le monde de la même manière et a fonctionné comme un miroir grossissant des inégalités.

Elle touche la santé mais aussi l’éducation.

Les nouvelles formes d’apprentissages : s’adapter pour avancer

Dès le mois de juin 2020, l’UNICEF indiquait redouter que les inégalités d’accès aux outils et à la technologie n’aggravent la crise mondiale de l’apprentissage.

En effet, les différentes crises actuelles révèlent d’autant plus la fracture sociale que l’on observe un peu partout, car que l’on vive dans un pays dit riche ou en voie de développement, en ville ou à la campagne, dans un milieu social favorisé ou défavorisé, le niveau d’accès à l’éducation et à la qualité de l’enseignement n’est pas le même.

Face à l’enseignement à distance mis en place, là aussi de façon plus ou moins réactive et efficace, nos jeunes sont confrontés à diverses problématiques :

– L’accès aux outils et à la communication
– La compréhension et la gestion des outils informatiques
– L’organisation du temps de travail
– L’aide et l’accompagnement pendant la continuité pédagogique (des professeurs et de la famille)
– L’isolement physique et l’absence de lien social (en dehors du cercle familial et des réseaux sociaux)
– La capacité d’adaptation et l’autonomie

Les enfants et les étudiants n’ont pas eu les mêmes chances face à l’ensemble de ces problématiques et ils ont dû et doivent encore relever de nouveaux défis et s’adapter pour continuer à apprendre dans cet environnement incertain et mouvant.

Mais comment cela se passe sur le terrain ?

Les nombreux témoignages recueillis auprès des jeunes et moins jeunes nous renseignent sur les difficultés rencontrées et les ressources à mobiliser pour avancer.

Les élèves de 6ème du Collège Français Bilingue de Londres (CFBL) interviewés, nous disent avoir « tous appris sur eux-mêmes malgré cette période pas très drôle ».

Malgré l’isolement, de nombreuses activités ont pu être découvertes sur le temps extra-scolaire : la cuisine, les activités sportives quand celles-ci étaient possibles, les jeux en famille ou en ligne, le travail et les devoirs online avec des amis…ces jeunes ont tous été fiers d’avoir développé leur créativité et progressé côté informatique.

Pour Eva, étudiante en 1ère année à l’ESDHEM – SKEMA en licence éco-gestion, intégrer le supérieur dans ces conditions est quelque peu frustrant.

Alors qu’elle choisit de s’orienter vers le commerce et les ouvertures que proposent habituellement les écoles de commerce, le manque de lien social avec les autres étudiants et les professeurs pèse.

« Du fait de l’organisation et des précautions sanitaires, je ne connais que la moitié de ma classe, les événements type soirées d’intégration ont été annulés, nous passons 8 heures par jour derrière nos ordinateurs et parfois il me semble compliqué d’interroger le professeur en classe virtuelle si je n’ai pas compris une chose, j’ai peur de déranger toutes les personnes connectées). Les projets et les objectifs de développement d’une association semblent abstraits et je ne vois pas vraiment comment développer mon réseau (ce qui est dommage en école de commerce !) ».

Face à ce constat de frustration, Eva voit aussi du positif dans cette situation : « le contexte actuel fait que l’on doit être plus rapides dans les actions et apprentissages. Cela me permet de développer mon autonomie, ma capacité d’adaptation, je dois apprendre à travailler seule et à me battre, et puis, je trouve parfois un certain confort à rester chez moi, il y a moins de déplacements…) ».

Bertrand Vergely, philosophe et professeur d’université, encourage les parents, les enseignants et plus généralement la société à soutenir et accompagner cette génération qu’il qualifie de « fragile » : « Cette génération a besoin de s’appuyer sur des fondamentaux (…). Ils ont besoin de savoir qu’ils font partie d’une histoire commune, d’une aventure collective. Et, en philosophie, on doit leur rappeler des généralités, la définition des mots, des concepts qui permettent de réfléchir. Il faut revoir avec eux un certain nombre de choses très simples pour qu’ils aient les idées claires. Si vous êtes au clair, vous pouvez traverser ce monde. »

Marie Boutry-Peyron
Avenue des Écoles
marie@avenuedesecoles.com

Article écrit pour l’ECHO Magazine – Février 2021

Sources :
Culture et inégalités à l’école – Julien Netter
Article de Samuel Piquet paru dans Marianne en Juin 2020 – Les symptômes d’une génération fragile
Témoignages d’élèves du CFBL à Londres et de jeunes de l’ESDHEM Lille

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